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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

dimanche, août 29, 2010

Jeudi matin, contemplation, par l'entrebâillement des volets, de la cour-jardin de la maison voisine, que je domine, en attendant que la vie s'éveille, en luttant contre le souvenir de ma grande faiblesse de la veille qui me faisait flotter pour mes petites courses dans le quartier, en m'offrant le ridicule d'une petite appréhension de cénobite avignonnaise (la parisienne agitée est loin) à l'idée de prendre, aventure !, un car inconnu (lequel, mon Dieu ?) pour aller dans un centre commercial puis dans le centre de Toulon, cette grande ville où je n'ai plus mes repères, vers le Centre d'art (qui n'existait pas de mon temps) voir l'exposition Morandi.

et puis départ tout de même, sous la garde du soleil et du Faron amical, parce que le ridicule était excessif, parce que l'envie était grande (malgré les commentaires désabusés d'eux tous, visiteurs plus ou moins familiers du Musée de Bologne), grand le désir pour moi qui ne connaissais que des reproductions et quelques oeuvres et dessins rencontrés au gré d'expositions.

Dans le hall, après les petites salles du rez-de-chaussée, (des photos de l'atelier, des dessins de fleurs chantournées comme des coquillages ou des grottes, et ces toiles représentant des vases de fleurs que je suis incapable de gouter), en allant vers l'escalier, sur le mur, cette phrase « il n'y a rien de plus surréel ni de plus abstrait que le réel»

Cette petite toile de 1957, d'une collection privée, que j'aime pour l'imbrication des volumes, les traits séparant les objets, de même valeur que l'ombre (mais toutes mes photos, prises à partir des reproductions du catalogue, malmènent un peu les couleurs très délicatement indécises telles qu'elles sont dans mon souvenir, respectant cependant les équilibres de valeurs)

Les toiles très claires, presque blanches, de 1952,

et les toiles sombres de 1941 dont on dit qu'elles sont la détresse de la guerre, qui le sont sans doute, mais qui, et surtout dans le cas des bruns de celle-ci (et de la casserole épatante pour rappeler qu'il fut futuriste et «d'avant-garde»,) me donnaient d'entrée une sensation de chaleur tendre

les beaux paysages, géométriques et délavés des années 60, devant lesquels, tombant dans ce travers que je déteste, me sont venus le nom de Juan Gris, et puis, malgré leurs différences, pour le côté humide, évanescent, le souvenir vague des paysages de Music, d'avant-guerre. (lubie personnelle)

Trouvé cet après-midi de samedi un passage de Jean Christophe Bailly http://remue.net/spip.php?article1607 et oui,

«C’est comme si chaque instant pouvait, sans se modifier le moins du monde, absorber toute l’histoire et toutes les passions, comme si la peinture devenait une sorte de... cérémonie du thé, mais pour les yeux - l’art de laisser infuser les feuilles de la sensation dans l’eau du détachement. Regarde ces trois-là (elle montre une Nature morte de 1953 où trois objets quasi identiques sont posés côte à côte), ce serait tout le Japon, tout l’Orient, s’il n’y avait pas sur leur peau, c’est-à-dire dans leur être même, quelque chose qui vient de la terre d’ici, ou plutôt du rapport qu’il y a ici entre la terre et la lumière. Et, dans ce rapport, quelque chose de paysan - un goût de grappa, de lait et de bois, le goût même de cette couleur que le peintre n’a pas choisie mais qu’il a reconnue.», mais j'y vois, personnellement, souvent, surtout une étrange mais évidente monumentalité, comme dans cette petite (30,50 X 30,40) huile de 63, ma préférée je crois, avec cette succession de bandes, le raffinement de leurs proportions et des niveaux de couleurs, la grande bande centrale, de même hauteur, mais pas tout à fait, que la panse du vase blanc, et l'opposition entre le gris bleuté de gauche et le blanc de droite, qui fait avancer le vase, cet ensemble qui m'a donné, au premier coup d'oeil, l'illusion d'un paysage de colline et d'un bâtiment (usine ?) appliqué sur son étagement par une lumière froide.

(trouvé aussi, chez Jean-Michel Maulpoix un bel article de Florence Trocmé http://www.maulpoix.net/morandi.html qui me donne furieuse envie de lire «le bol du pèlerin», le texte de Jaccottet sur Morandi)

En sortant, dopée un peu, des souvenirs, ou l'idée de souvenirs, me venant dans le soleil, à la limite de la banalité inspirante, pour moi, de la place de la Liberté, j'ai eu envie d'un petit tour dans la ville, point trop long pour ne pas risquer de retarder les autres pour leur bain de midi (pas certaine d'avoir toutes les clés), et j'ai remis mes pas dans ceux de l'enfant ou de l'adolescente, retrouvant des lieux métamorphosés

(sauf ce qui est immuable, comme le port, et même là, il y avait cette muraille métallique qui évoque assez peu les croiseurs)

Je suis repassée dans cette rue du vieux Toulon (où nous ne nous risquions pas), restaurée, où j'ai hésité à m'installer il y a cinq ans – et la population visible était, toujours, essentiellement masculine.

J'ai retrouvée la plaque, les immeubles, de la rue d'Alger, haut-lieu de notre shoping, alors, déserte maintenant, et quelques unes des fontaines



y compris, passage obligé, et déception habituelle (une merveille touffue dans un coin de ma cervelle enfantine) celle de la place Puget

et, sur mon élan, malgré l'ennui d'une partie du trajet (murs du lycée et stations services) je suis rentrée, lentement, agréablement, sous le soleil bien fort, mais avec petite brise, jusqu'à la maison de ma soeur.

Soir de fête, ai retrouvé, et en ai profité, toute la génération suivante, pour laquelle ai grande amitié, et les deux petiots.

Et vendredi le retour, partagée entre l'inquiétude sur-jouée mais réelle pour la survie de mes plantes (ont été vaillantes) et une promenade sur la liseuse, cocktail assez réussi de Michelet (se gendarmant déjà contre la sur-pêche), Proust et Pierre Ménard (j'avance par petites goulées dans « deux temps, trois mouvements » http://www.publie.net/fr/ebook/9782814503427/deux-temps-trois-mouvements, goûtant ce qui est là, avec plus ou moins d'évidence, cherchant à établir des correspondances, ou non, entre les passages rapprochés par l'entrelacement entre deux années de notes quotidiennes)

Les lumières, la chaleur (un peu plus forte), le vent (nettement plus fort) d'Avignon, samedi matin.

11 commentaires:

Les cénobites tranquilles a dit…

Heureusement Toulon
Rime avec Avignon

Pierre R. Chantelois a dit…

Mais quand viendra l'heure de la pause, du café ou du thé, d'un fauteuil en rotin, d'une petite bibliothèque perdue au centre d'un salon embourgeoisé et lambrissé, d'une lampe toute déglinguée? Pourquoi ai-je le sentiment de connaître la réponse? Pour un samedi matin... ou tout un samedi... les heures n'ont pas dû s'égrener lentement.

MATHILDE PRIMAVERA a dit…

Quand les vacances deviennent un vrai pèlerinage avec tout de même un plus, la découverte de ce musée !
Au final, je suppose que prendre ce car n'a pas été aussi terrible !
Mais, je te comprends, quand on ne connait pas, même prendre un car inconnu peut relever de l'aventure ! Tu aurais d'ailleurs dû mettre un titre à cette publication du genre "les folles aventures de Brigetoun".

Brigetoun a dit…

fiche toi de moi amie, je l'ai fait aussi

Lautreje a dit…

Morandi, coup de coeur pour le mariage des couleurs avec les ombres.
J'imagine que tes plantes sont en meilleur état que sur la première photo ? (rires!)

MATHILDE PRIMAVERA a dit…

Brigetoun, mais je ne me moque pas de toi, dans ton cas je n'aurais pas fait mieux, moi aussi je me serais demandé (sérieusement) où va me laisser ce car, vais-je retrouver mon chemin, est-ce qu'au moins je ne vais pas me perdre ? Je ne me permettrais pas de dire une telle chose si je ne peux pas l'appliquer à moi-même !!! Avant de regarder la paille dans l'œil du voisin, on ferait mieux de faire son auto-critique et pour la mienne je suis fortiche !!!

Brigetoun a dit…

Mathilde j'aurais su essayer de décrire mon sourire en te répondant - je l'ai très bien pris et parfaitement compris - mais je me suis réellement moquée de moi (et en passant suis arrivée à ce que ma soeur se charge de la course-cadeau pour le soir)

Fardoise a dit…

J'adore Morandi, ses peintures comme ses gravures, la densité dans le minimalisme, une matière présente bien que si légère. Ce que tu montres de la ville de Toulon donnerait envie de s'y installer en effet.

Brigetoun a dit…

moi non, j'aie y revenir, j'aime certains souvenirs, j'aime ceux que j'y retrouve, j'aime surtout la rade que je ne montre pas là, mais ça a été le cadre d'une adolescence révoltée, violemment, et je garde un certain recul

Gérard a dit…

Attiré par les peintures que tu présentes

Anonyme a dit…

Me revoici dans le bain......par ces qq images et rentre demain de la campagne vers chez moi ce Toulon entre aperçu qui me manquait..... les commentaires sur Morandi sont différents des miens je garde pour mes archives les mots de "brigetoun" en plus
Arlette