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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

samedi, octobre 08, 2011


premier vendredi du mois, jour des vases communicants.
Et résultat, à la va comme je te pousse, des perplexités, plaisirs grands, stress entre connexion à fading qui me bouffait temps, et du nombre et de la taille de ce qui me restait à lire et que je ne faisais que ronger.
Ce qui a donné une énorme tartine qui risque fort, prévenus vous êtes, d'être légèrement indigeste, et plus ou moins juste, telle que l'a autorisée ma tension/fatigue/impuissance/désir (devrait être masculin, mais non)
Seulement je m'étais trop précipitée et il y eut ensuite goûter le soir, en relire certains, lire autre pour plaisir et politique, écouter, dénouer nuque (mais pas commenter ou fort peu, me sentais pas capable)
mais bien sûr il y a le regroupement fait par Pierre Ménard http://www.scoop.it/t/les-vases-communicants

le Québec
introduite par François Bon faisant le récit de leur rencontre, et de l'installation de Naomi, après publication de son livre, dans le studio qu'il a occupé
récit repris par elle, et sa difficulté à écrire (« Je me questionne sur mon rapport à l’écriture. Est-ce que j’écris par besoin, à cause de ces histoires que j’entends, impossible à retenir ») le texte qu'elle nous donne ensuite : Nepi
la réserve et l'histoire de Nepi, abandonnée, la boisson, la tante inquiète et les filles... (et c'est merveilleux de tendresse retenue, de précision, de netteté et de poésie)
« Nepi, comme on l’appelait autrefois. L’eau de feu qui engourdit le corps et l’âme, par soif de rien. L’intention qui se désagrège, tandis que la nuit tombe laissant des ombres humaines. Nepi circule docilement dans les veines, insouciant de l’enfant qui pleure, qui s’endormira exténué. Le regard ivre, et derrière, le cœur blessé. La femme connaît son malheur. Elle le tue par petites gorgées. »
et puis le nom de sa mère, la décision, et depuis un mois elle est sobre.
et
au Québec : le fleuve « parce que je ne savais pas qu’un fleuve pouvait être ainsi » si royal qu'il n'a plus de nom
« À quoi bon nommer un fleuve, s’il n’y en a qu’un ? On nomme les rivières qui le rejoignent, mais elles se ressemblent toutes, surgissant transparentes d’entre les épinettes : alors elles ont gardé le nom plus ancien, le nom que leur donnaient celles et ceux qui pour l’hiver les remontaient jusqu’au campement de trappe. »... et longue et belle déclaration d'admiration (toujours émerveillée, moi, simplement par les photos, alors...) et puis la route qui longe le fleuve, qui traverse une forêt sans jamais de chemin, cette route qui tiendrait de Menton à Dunkerque (en la serrant un peu) – et la langue (bon là c'est pas celle de mon sud) – lisez et voyagez, un peu, un moment.

les valises
regarde, nous montre, une valise à New York qui se détrempe sous la pluie, dangereusement proche d'une poubelle, pendant que son propriétaire, dans la librairie Strand, « mains glissées dans les fins gants blancs qu’on lui a fournis, il n’ose cependant tourner les pages de l’un des deux seuls exemplaires subsistants de l’anonyme Art admirable de faire communiquer les vases mis à la portée de tous, imprimé à Lyon, en langue vulgaire, dès 1478. » (il y a une vidéo que, par la faute de la connexion problématique, je n'ai pu ouvrir)
et
jubilation à la lecture de la façon dont se délite la décision de « voyager léger », et puis :
« Ce qu’il faut, c’est une valise à paroles.
Ca tombe bien, nous avons ça en magasin. Et avec elle, on peut y aller, ça tient sans craquer, la petite jupe d’été, les 2 robes mi-saison, les 3 pulls chauds, les 4 jeans, les 5 petites culottes, non, les 6, et puis aussi la brosse à dents, la brosse à cheveux, la brosse à sourcils, et même la brosse à reluire, ainsi que les 7 pêchés capitaux, les 8 merveilles du monde, les 9 vies du chat, les 10 commandements, les 11 coton-tiges, les 12 coups de minuit et les 36 chandelles. »

les messages indésirables
titres « des dépêches en lien avec cette ville de Chine que je ne connais pas » et qui atterrissent dans sa boite mail
'La Chine va restaurer une statue bouddhiste de 800 ans
Carrefour renforce sa supervision des prix pour restaurer son image en Chine
Chine : les législateurs et les conseillers politiques souhaitent la paix et la stabilité en Afrique du nord
Des dirigeants chinois appellent à se préparer à surmonter des difficultés et des risques »
et
un texte (en fait une suite de six) à partir des pourriels (les trucs qu'on trouve dans os boîtes aux lettres ou nos sites) avec interférences, jubilatoire
« Il ne l’aurait pas terminé, le Requiem qui aurait dû couronner une vie de Passion et de Musique ! As-tu déjà observé les enfants jouer sur un carrousel ? Et ce n’est qu’après sa disparition que son plus proche élève, d’accord en cela avec sa dernière femme, se chargea de poursuivre l’œuvre que la mort avait surprise. Ou écouté la pluie tomber sur le toit ? Impérieuse mission !

les oloés (où lire et écrire)
revient deux ans après, en autre saison, vers un oloé (mot que nous lui devons) de campagne, où n'avait pu lire ni écrire
« Des cloches d’église, des détonations, des chasseurs, un chien ; devant, les buissons, le coin à framboises, la haie où l’hiver on trouve du houx.

Tout cela, des notes. »
et la voix de l'oloé ne pèse plus
et
vers son oloé champêtre à lui, loin du bureau, des téléphones, prendre la route, passer le pont, regarder, faire sien l'endroit
« Mettre le temps entre parenthèse, être sur chaque branche, derrière chaque brin d’herbe, sous chaque rocher, sur chaque molécule d’air, et y puiser la force, lente et inébranlable, de cet espace que rien ou presque ne vient troubler, où règne une harmonie rare. »
harmonie qui s'étend au train qui passe, au chevrier rencontré

deux fois deux photos et deux textes
triste histoire d'un enfant et d'une lutte entre parents
« Vous vous souvenez des deux photos ? Celle de l’automne et celle de la fenêtre. Retrouver ma maison, ce serait comme marier (d’un vrai mariage, cette fois) ces deux paysages : celui que je ne reconnais pas et celui où il manque quelqu’un.
En fait, j’ai l’impression d’avoir la vie pétée en deux. »
et
« Fenêtre. Fille encadrée sous vitre.
Autour : architecture allemande, début du siècle, rue vide. Caresse du soleil contre la pierre fraîche. Discours de la méthode d’ébouriffement des plumes entre deux pigeons citadins. Rambarde du balcon. Sale. Brune. Vécue. Rambarde du balcon. On dit “rampe”, quelquefois, ici. »

se prendre pour l'autre, pas facile disent-ils, pas si mal pourtant :
n'être que g@rp ? V'là ô-t-chose - «essayez, vous, d’être un gastéropode qui a mal aux dents.. non ? pas tenté ? » et cela continue en belle fantaisie, au style fermement guilleret, en râlante, récit, dérive, fragments d'évocations de souvenirs de musique.... allez y voir.
« Abbey Road maintenant. les premiers nés au matin. les derniers morts. les sirènes.
« cours charly ».
personne ne croira un témoin qui pensera avoir vu en contre-jour qui se lève un gastéropode et son chien. »
et
derrière la porte, attente et appréhension, viendront les lecteurs ?
« rebondir vers d’autres lectures & s’envoler.
ou tu t’envoles.
ou tu te fracasses
ouvrir les fera venir.
certitude & doute valsent dans l’ombre où j’oscille, incertaine, de ce côté-ci – de mon côté, c’est certain
ou tu t’envoles.
appréhension.
& s’ils ne
venaient
pas
? »

contre-bas : un récit horrifiant - descendre avec Vautour à la suite d'un toi, en quête d'un trésor, en dépit des interdictions dans les entrailles d'une grotte (et il y a le chien, le fleuve, le souvenir des enfers bien sûr) et les êtres, les bruits, etc.. (lisez)
« C'est malin dans le fond qu'il meurt ici, son âme n'errera pas, vu qu'ici c'est bien sa place. Du gouffre, encore luminescent, un ectoplasme s'élève, frémit, flotte vers les ressuscités. Ceux qui t'entourent et discutent avec toi. »
et
les dédales d'une vieille épicerie, la dernière du village, les entassements, et derrière, au fond, privé « chez Jeanne »
« Vieille dame un peu sourde, il fallait toussoter deux à trois fois avant qu’elle ne vous entende. Claudiquant, le dos en trombone, elle faisait glisser sur le vieux carrelage ses pantoufles grises et au milieu de son épicerie, levait la tête vers vous s’enquérant de la personne qu’elle avait en face d’elle, si elle la connaissait et qui elle était. »

à partir de « Celui que nul ne voit et qui séjourne partout est le temps.» (Quignard)
petites strophes délicates, mots simples qui chantonnent en mineur, pour le trajet familier
« les épaules qui se voûtent, le corps qui se tasse,
vieillir
et toutes ces ombres sous vos pas soulevées,
bruissements, fantômes,
raser les murs, »
et
texte toujours bellement travaillé, découpé,
« Longtemps vous imaginez le temps une maison noire aux murs infiltrés de poussières de lumière et, » un jour vous partez
« les arbres nus se couvrent de feuilles de fleurs de fruits et les arbres nus redeviennent nus. »
vous vous arrêtez, vous regardez, « votre corps épouse la tristese du ciel »
et le voyage pédestre, l'avancée dans votre temps continue, avec des rencontres, des aubes.... lisez

beau texte en 4 séquences – un réveil mauvais
« Tête en cadre, coincée dans son tranchant châssis, je déclaudique en survolant les marches, claque la porte, prend la rue à contre-vent dans le dos, escarpement, dénivellation, qu’importe, partir loin, loin, loin »
- le train, une femme, un torrent de sensations et de mots – le magasin – le beauté trouvée (et tout est dans le plaisir de la langue et de ses inventions)
et
antienne en réponse à “Dis-moi, Spinoza, y a-t-il autre chose que la joie ?” il dit que ce qui s'élève (ou elle..), elle dit que ce qui pèse (ou il..) , il ou elle danse la félicité
« C’est le début du monde. De IL et de ELLE, Profanes sacrés.
Le temps qui n’a plus ni commencement ni fin.
Plus besoin de chaussures et de ce qu’elles signifient… Pieds nus, danser
Peuvent pendre… peuvent pendre… »

son
Radio-Marelle (Pierre Ménard) http://www.starsky.fr/?p=544
écouter le son de Détroit ou l'enregistrer
et lire :
« We almost lost Detroit
Et j’ai vu en effet des grands bâtiments trapus et vitrés, des sortes de cages à mouches sans fin, dans lesquelles on discernait des hommes à remuer, mais remuer à peine, comme s’ils ne se débattaient plus que faiblement contre je ne sais quoi d’impossible. C’était ça Ford ? Et puis tout autour et au-dessus jusqu’au ciel un bruit lourd et multiple et sourd de torrents d’appareils, dur, l’entêtement des mécaniques à tourner, rouler, gémir, toujours prêtes à casser et ne cassant jamais. ».....
et
une belle « bande son » à écouter ou télécharger
et : « C’est le travail d’être là qui m’occupe désormais. 

Entre arrimage et porosité. L’air circulant sans effort dans les poumons, n’y restant jamais contenu, passant à travers. Frotter de ses pieds le sol et ses aspérités, accompagner le mouvement de la terre sans tomber. Prendre le vent. »

cinéma
image de cinéma figée, image d'un début de rupture - réflexion qui allie profondeur et charme de l'écriture souple
« Je me laisse bercer, le souffle de cette musique. On peut entendre des grognements dans certains morceaux. Lorsqu’une image prend enfin vie et que le rythme du montage photographique s’accélère pour laisser place à un moment cinématographique, à un moment qui prétend à la vie, c’est la femme qui s’éveille, littéralement. C’est là qu’il rêve le mieux d’actions, d’avoir toujours un mot aimable pour elle, de faire répondre le mieux possible. Je ne dis pas non systématiquement. Des spectres. Elle prend vie. Lui demeure figé, mort. »
et
dialogue d'ex-anges (les ailes du désir)
nostalgique, fin, les deux anges des ailes du désir se souviennent de Peter Falk et de la danseuse, de quand étaient plus jeunes et vivants, quand entendaient tout, quand pouvaient aider, et passer à travers les murs, et du Berlin du film
« ― Vois comme la ville a changé. Pas seulement, parce que nous percevons maintenant les couleurs. C’est la ville elle-même, je crois, qui est passé du noir et blanc, à la couleur. Les couleurs de l’automne sur Tiergarten. L’or de la Siegessäule dans le soleil du matin. Tu te souviens, comme nous y étions souvent, à notre vieux poste d’observation ? »

en harmonie
et pourtant : toi, malade, en errance : beau (et liens vers des textes de Daniel Bourrion avec lesquels ce texte rentre en résonance)
« Qui suis-je pour juger de ton refus de continuer ? Cette douleur incandescente, ta présence qui brille par son absence aux autres, qui donc pour comprendre ? Je t'ai pourtant vu t'effondrer parmi les autres, ton corps craquer et basculer vers poussière et que n'ai-je fait ? Le ciel est lourd ce soir comme chargé de ma culpabilité. »
et
sapes :
nous, hommes morts, les femmes sortent les beaux vêtements gardés pour cela, les pendent devant la fenêtre pendant la toilette (les mots au plus juste)
« Cela n'importait pas. Nous déjà morts n'étions plus touchés par grand chose et puis quand même, par-dessus tout, nous étions pleins maintenant de cette joie qu'ont les enfants qui se costument alors mourir, vraiment, ce n'était rien. »

phare
un texte écrit après avoir lu celui de François Bon sur « Armen » de Jean-Pierre Abraham http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article2643
désir de monter dans le phare – nettoyer la lanterne – appliquée (ai jetée un regard suppliant un pardon sur mes vitres), sensuelle
« ton chiffon est suffisamment doux et absorbant, il est comme qui dirait de ton côté, il s’agit de ne pas se laisser distraire par la résistance du sang et de l’air qui sont faits de la même matière, épaisse, ne pas écouter le corps qui te tire vers le bas, la pensée que tout ça est inutile, qu’il faudra tout recommencer le lendemain, il s’agit d’oublier que le désir manque »
et
souvenir du rendez-vous avec Juliette, sur l'esplanade
« Devant la mer, grise et tranquille, je n’ai trouvé que le vieux banc de pierre et des rumeurs, contradictoires, me traversant la tête. La mer qui est toujours plus belle quand on la regarde à deux. Je l’ai attendue, encore. Je me suis rappelé, le regard perdu sur l’horizon, les derniers mots que nous avions échangés, la veille. »
et le gardien de phare, déçu, remonte l'escalier

questionnement
demande où est notre authenticité ? Dans notre monde saturé de langage, saturé de mensonges, et une fois encore, il est assez jubilatoire de suivre, vaille que vaille, son cheminement
« Où est notre authenticité ? On peut la chercher, bien sûr, dans le geste, dans la réaction immédiate aux situations du monde, dans le geste que nous accomplissons, dans l’élan du monde qui nous emporte, et bien sûr, au delà du geste, dans l’action que nous assumons, la décision qui entraîne un élan dont nous ne pouvons pas nous abstenir. Mais elle peut tout aussi bien être dans le portrait affiné, que nous donnons de nous. L’authenticité sans doute peut être silencieuse. Mais elle peut être aussi enveloppée de langage. »
et
questionnement en un long texte à propos de Novalis, de l'importance de la représentation pour la philosophie, sur la langue et le signe...(suivi cahin-caha par Brigetoun, mais c'est gentiment rendu accessible)
« Ainsi, le langage en tant que production de fragments dépend-il de l'Indicible (Unsagbare), comme le mot est le chiffre d'une vérité qui ne peut être entièrement dévoilée. L'image n'est pas dans un rapport d'imitation avec une Idée supérieure, comme c'est le cas dans la théorie de la mimesis, mais n'existe que dans une relation dynamique et instable entre plusieurs polarités »

échanges photos et textes
sur une photo de François Bonneau
nos maisons qu'on habite, qu'on ne voit pas ou plus, et, comme dans le texte de son vis-à-vis, le rythme de l'écriture
« Mais soudain il y a cette coupe. On habite tout près. Ce pourrait être chez soi. C’est chez soi, c’est chez chacun. On arrête pour voir. On est si semblable aux autres qui de même arrêtent… On pourrait être eux, et eux nous. Tous pareillement curieux de se voir soi. »
et
François Bonneau http://mahigan.ca/spip.php?article133 (livre annoncé chez Publie.net)
sur une photo de Mahigan Lepage`
cigogne, yeux dans les feuillages en haut, pas suspendu, avant la traversée, souvenir qui afflue,
« Je voudrais ne pas être attendu, en face. Je voudrais qu’il n’y ait plus d’autre superposition de cette même image, de ce carrefour imbécile, c’est à dire beau avec une couche de mauvaise foi par-dessus, plaque translucide après plaque translucide, le vert se délaierait peut-être, et peut-être moi aussi. Et puis : feu vert, d’un autre vert, qui ne figurait pas sur mon image. »

le cabanon du fond du jardin
la visite avec notaire d'une maison qui séduit,
« Je suis arrivée au rendez-vous avant le notaire, je voulais m’imprégner de l’endroit, tenter de sentir s’il m’accepterait. L’air était doux ce matin et une légère brise faisait chanter les feuillages. Il est arrivé avec une sacoche et les clés. D’abord le portail, puis la porte d’entrée. Je ne l’écoutais pas, je cherchais juste à entendre la maison. »
un jardin à l'abandon, un coffre... et irruption de l'étrange ?
et
y aller avec masque et tuba dans ce cabanon du fond du jardin (voué à un usage que j'ai connu aux temps de mon enfance), et sur le chemin une boite de bonbons enterrée avec... début d'une histoire
« Elle devait avoir le même âge que lui, 10 ans peut-être, et elle s’appelait Marine. Rien de ce que dirent les policiers n’étonna l’enfant, son petit doigt lui avait déjà tout raconté. Devait-il pour autant leur confier qu’il lui avait aussi révélé qui était l’assassin ? »

correspondance, complicité entre
à partir du beau texte de Maryse Hache chez Publie.net «Abyssal Cabaret » montre l'actrice (et reprend, en italique, des mots de Maryse)
« enroulée dans du papier à bulles, du sparadrap, une robe de dame, l’actrice chante
sur un charnier
les yeux peints les yeux exorbités, bouche de métal, bleue, sourcils retombent, l’actrice joue
de son instrument qui s’appelle l’ossature »
en toute beauté et « nous derrière toi, l'actrice, derrière toi »
et
qui entrelace ses mots et ceux de Christine pour « Lotus Seven » un chantier en cours
« La tension invisible tire. C’est lorsque tu attends qu’il rentre, s’il rentre, dans la pendule et le bruit de sa toux. L’idée idiote pendant que l’on te parle, tu as pourtant besoin de paix, et la nuit, la tension de ne pas savoir dormir, la peur de l’avoir désappris (on pourrait désapprendre à vivre aussi). (Christine)
la tension invisible tire. c'est la nuit, derrière la grande armoire. petits tambourins de lumière sur papier peint à bergères n'y peuvent. il peur, il peur bergère, rentre tes blancs moutons. tu as besoin d'un autre silence, d'un autre ton de voix, mais ne viennent. tension tire. encore. (demain quelque chose de très grave sera arrivé) » Maryse, en belle et longue patience, reprise, dentelle

rencontre de poètes
les sables rouges - poésie pleine d'iode, les marins et la vieille sirène
« Comment auraient-ils pu discerner,
sous le cri aigre du cormoran et l’hystérie des mouettes,
ce soupir clapoté sans cesse,
ce sanglot paisible de l’eau
qui retient la chair épuisée des enfants ? »
et
veiller le jour :
« Dormir dormir dormir”

Elle appelait la nuit

Réclamait la nuit

L’exhortait à poser

Son poids sur ses paupières

Sur son corps

Sur ses membres tremblants

Sur le trou qui s’ouvre

De plus en plus en

Elle »

vous
dialogue de vous à vous, distance et proximité
« Vous auriez pu ne pas m’apercevoir, ne pas me voir, ne pas me lire. Pardon. Vous reprenez. Vous auriez pu ne pas vous apercevoir, ne pas vous voir, ne pas vous lire. Cependant vous l’avez fait et c’est vous qui avez pris l’initiative du rendez-vous, du vous à vous. Et de vous à vous, vous avouez que vous ne regrettez rien. » mais qu'attendez-vous de vous ? Et la réponse est un peu courte
et
un lettre gentiment précieuse, envoyée de Murano, à « vous » entre plaisanterie et recherche
« Vous voit-on ou vouvoie-t-on? Vous n’aimez comme je vous aime, “je” étant de trop.
Vous ne m’avez plus regardé quand vos yeux ont pleuré. Vous ne vouliez plus être là, ni de ce monde, ni de son univers, ni de mon rêve. »

gens et mobilier dans la ville
trafiquer le national : un graffiti parmi d'autres, mais spécialement travaillé et percutant – son examen détaillé, son sens – une fausse carte d'identité, ce qu'il dit, ou ce qu'on se dit en le voyant, qui varie selon les jours (remarquable discours)
« Il m’a d’abord dit qu’il avait eu envie de se dessiner une identité trafiquée sur ce mur légal où, pour une fois, aucun employé de la mairie ne viendrait nettoyer ses traces indésirables. C’est bien trafiqué : il y a le dégradé de couleurs, les filigranes, les trois zones, les chevrons. Et c’est précisément le national qu’il a trafiqué, comme le dit bien la place du mot dans notre figement français souvent siglé : CNI. National est donc remplacé par trafiqué. Les mots sont-ils substituables ?... Et trafiquer le national avec de l’identité, Qitiao la Bomba, ça le fait bien marrer, comme le disent à la passante que je suis ses yeux qui semblent plissés de rire.»
et
Jérôme Denis (Scriptopolis) http://penseedudiscours.hypotheses.org/6958
ce que disent sur la société, sur la différence entre les sexes telle qu'elle les a décidé, les panneaux, comme celui ci-dessus, dans les aéroports
« Il y a l’évidence d’une association, sans beaucoup de marges de manœuvre, entre la pratique du soin des nourrissons et la qualité de femme. Il y a aussi, non pas un symbole, mais la transcription d’une organisation très concrète des lieux qui institue cette association jusqu’à créer un malaise pour les hommes qui voudraient s’aventurer malgré tout dans la pièce “nurserie” réservée. Il y a finalement une vague géante qui remonte du passé »

deux poètes - séparations
Te rejoindre – souvenir de la rencontre, besoin de retrouver, jalousie
« Et tu me diras que je suis stupide
D’avoir fait tout ce chemin pour rien
Je ne t’avouerai pas
Que c’est ma manière de combattre l’animal en moi
Celui qui mord ma viande et m’oblige à sans cesse venir
Te rejoindre »
et
depuis que je ne m'abrite plus sous ta peau
« De mes dents jaunes
Je devrais ronger
mes veines
et regarder s’évader
mon sang
rire aux éclats puis
fermer les yeux »

joli texte
« Pur mur dérisé.
Mûres pures déridées, vous êtes plurielles. Flottantes volages, vous êtes du genre féminin. »
et
essayer, raturer ou louper, tenter à nouveau
« J’ai évidemment cru ne jamais être capable de me remettre de toi – de ton absence, tes mains sur mes hanches, ta bouche trop sèche, ton appartement crasseux, la littérature, la photographie, ces choses que nous partagions et que je n’échange avec personne aujourd’hui. » et « Rattraper au vol les espoirs déchus dans le sourire d’un passant croisé à un coin de rue. »

corps
poème faussement heurté, avec talent
« Ils plient
L'amour
Dans le concert gluant de leurs débris »
et
tranchant = désir de maigrir jusqu'à disparaître (quelques mots et des images qui viennent)
« garder juste ce qu’il faut de force pour écraser les oiseaux entre deux pierres, clouer les grenouilles sur les troncs, entendre le sang des autres s’écouler, secouer les boyaux de sa tête, se cacher dans un pli de la terre. »

avant que le jour s'efface (Christophe parle de vertigineuse énergie, de matière noire, brute)
un monologue ou le je se dit tu
«Pour te retrouver comme on dit dans le vif du sujet, expression qui te cloue quasiment au sens propre, alors entre mort et vif c'est vite tranché, puisqu'à l'origine tu as déjà perdu. Le lieu est trop vaste et malgré l'absence de sujet ne ressemble en rien au désert, semble même étrangement habité, je crois que tu pourrais y vivre et peut-être en faire quelque chose si tu cesses de lutter contre ce qui t'envahit » mais il y a toutes ces vies qui veulent être dites. « Les laisser murmurer, crier et s'incarner dedans, dire simplement ce qui vient et ce que tu entends.La crédibilité ici n'a aucune importance, l'essentiel est de ne pas lâcher, alors tu y vas c'est tout, et même sans savoir où. »
et
carte, écart et trace : la mémoire, restes d'enfance et mots d'adultes – nos corps qui se souviennent
« Nos corps ont tracé une nouvelle carte pour savoir dans quel quartier de l’orange ils s’épluchaient aujourd’hui, dans quel autre ils pourraient pourrir. Ils ont fait cet écart pour éviter de pourrir dans leur propre orange. Puis ils ont dessiné en mots (des balises en réalité) des attitudes, des choses qui ne se disent plus, des comportements contradictoires afin de connaître les différents lieux où soigner leur dédoublement »

promenades en photos place de l'Etoile
et pour les deux ce sont surtout les photos qui comptent, même si gentiment ils nous fournissent quelques mots avec (et vont jusqu'à les choisir avec soin)
« Puis, en descendant à pied « la plus belle avenue du monde » jusqu’au métro Franklin Roosevelt (écrit en idéogrammes japonais dans la station : le R serait donc un H), je me suis aperçu que j’avais oublié d’emporter mon ancien livre de poche de Patrick Modiano , La place de l’étoile (Folio N°698, édition de novembre1975, dessin Michel Gayout d’un type sans tête portant à sa place l’étoile jaune de David avec la mention « Juif » en noir), et j’ai été racheter un peu plus tard le seul exemplaire disponible au Virgin Megastore, avec une couverture bizarrement modifiée (Folio N°698, édition d’octobre 2010). »
et
belles, belles, la place de l'Étoile (comme ne l'avez pas vu) et ses entours
« La Tour Eiffel est là
Et la lune ici »

visions de l'automne
Pierre Chantelois, ci dessous,
raconte l'histoire de Hortense qui a 82 ans ; qui a froid ; et la ponctue de merveilleuses images d'un parc en automne
« Hortense est venue dans ce parc, par un beau jour d’automne, pour regarder une dernière fois ces couleurs de la vie. Ses couleurs, devrais-je dire. Elle qui est née un jour tout blanc. Elle qui habite une chambre toute blanche. Elle va, sur ce banc, s’endormir. Elle le sait. Elle veut dormir avant que n’arrive un autre jour blanc.. »
et
pense, encore, à l'automne, en peu de mots, paralysée d'avance.. pour le figer au stade de l'attente ?
« Quand le froid nous pénètre, quand la seule chaleur est dans la lumière souveraine, sa caresse sur les troncs, la rousseur brillante des feuilles non emportées»

10 commentaires:

Pierre R. Chantelois a dit…

Que de beaux textes. Je suis allé relire François Bon. L'amour du fleuve m'a poussé à m'y rendre. Danielle Masson, également. À cause de François Bon. J'étais allé plus tôt Christine Jeanney. Et Maryse Hache, à cause de Christine Jeanney. J'ai découvert la galerie de photos de Justice Neubach. Magnifique. Et j'ai poursuivi au cours de la soirée (avantage du décalage horaire) mes lectures passionnantes (Nicolas Bleusher et Juliette Mézenc, Lautre je et G Balland). Merci Brigetoun de cette invitation à participer qui m'a beaucoup ému. Les commentaires m'ont beaucoup touché. Et surtout, merci pour ce beau texte publié chez moi. Et pour ces photos qui vous sont si personnelles... que j'adore. Avant de sombrer dans l'obséquiosité je me retire dans mon antre qui sent déjà l'hiver.

andree wizem a dit…

les montages photographiques sont toujours étonnants
intuitifs sans doute mais plein d'aplomb et de subtilités

JEA a dit…

Secrétaire perpétuelle...

Lautreje a dit…

Travail titanesque !
Je reviendrai lire et déguster morceau par morceau.

mel13 a dit…

toujours admirative de ce travail fourmiesque et titanesque: je n'ai pas tout lu hier, mais déjà de belles découvertes (céline renoux en particulier) et votre belle patience permet d'aller d'abord à, avant... (refus de hiérarchie, de classement, simplement plus en accointance avec un texte qu'un autre)

jeandler a dit…

Les jours et les nuits ne seront plus suffisants bientôt
et dire que l'on ve revenir à l'heure d'hiver. Quelle moisson !
Et de plus les images aussi communiquent...
Mon chapeau (mais où donc l'ai-je mis ?) bien bas devant la "secrétaire perpétuelle ".

Flo H a dit…

Conscience, généreuse, curieuse et si humble.. Une vraie et belle direction artistique. Merci de tout ce travail appliqué.. On souhaitait déjà lire qu'on s'en aimante encore plus. (sans fôtes! :p )

Brigetoun a dit…

merci à vous

arlette a dit…

Et la tête me tourne encore ce soir comme le vent fou de la journée je reviendrai plus lentement

Lautreje a dit…

quelle richesse ces vases !
j'ai pleuré sur le banc blanc, dansé avec une valise, parlé avec les anges, et puis je me suis demandé quand étais-je authentique, je cherche ... je reviendrai pour la suite.